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TITRE:

BAZAR BELLAMY 28 OCTOBRE 2022


TYPE:
INTERVIEWS
GENRE:

ROCK



Music Waves a interviewé le très éclectique Bazar Bellamy pour la sortie de son album "Trompe La Mort".
ADRIANSTORK - 19.12.2022 -
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Music Waves a interviewé le très éclectique Bazaar Bellamy pour la sortie de son album "Trompe La Mort". Le titre de cet album a pour vertu d'exorciser tous les maux occasionnés lors de l'ouverture du premier sceau de l'Apocalypse : l'épidémie du Coronavirus et son implication dans le confinement de 2020.


Bazar Bellamy, nous vous avions rencontré lors de la sortie de votre premier album "Jusqu'Ici Tout Va Bien". Quel regard portez-vous sur ce premier essai aujourd'hui ?


C’était une première étape, le résultat de la construction du groupe, comme un faire-part de naissance.


Qu'est-ce que ce premier album vous appris ? Avez-vous enregistré ce "Trompe La Mort" en changeant de méthode de travail ou aviez-vous trouvé votre système du premier coup ?

Pour "Jusqu’Ici...", nous avions enregistré basse batterie ensemble et les guitares voix après, pour gagner du temps car nous n'avions que 4 jours pour tout enregistrer. Cette fois-ci, tout a été fait séparément, nous avons pris plus de temps pour les prises, c’était plus confortable. La méthode de composition aussi a changé, une bonne partie des titres a été composé durant le confinement, en solo. Mais nous n’avons pas une seule méthode de compo, on fonctionne au ressenti.


Mais nous n’avons pas une seule méthode de compo, on fonctionne au ressenti.


Qu'avez-vous voulu évoquer avec ce titre étrange ("Trompe La Mort"), un pied de nez à la Grande Faucheuse ?

C’est tout à fait l’idée, le pied de nez à la mort. C’est suite à la crise covid : nous l’avons tous chopé en même temps en juillet 2020, avec différents symptômes. Et à la même période, la disparition d’amis proches aussi, avec ce foutu cancer. Il y a l’idée de cette épée de Damoclés encore plus présente ces dernières années avec la Covid, les menaces nucléaires de Poutine, le réchauffement climatique. Et par dessus tout, la soif  de vivre intensément, de faire la nique à la mort. Je pense aussi au dernier album de Georges Brassens, qui portait le même titre.


Le premier morceau nerveux nous parle d'une personne-chien enragé qui court vers son chaos. Débuter l'album de façon agitée était-elle une façon de nous dire que ce voyage ne serait pas de tout repos et qu'il vaut mieux s'habituer dès maintenant à entrer dans un cauchemar éveillé ?

Les temps que l’on vit sont chaotiques. Il y a un vrai manque de respect, de valeurs, et aussi une confusion entre la vitesse de l’information et le temps nécessaire pour la connaissance. Le dystopie s’incarne de plus en plus autant dans les gouvernements qui s’en défendent que dans ceux qui la dénoncent. Tout est confus. Il faudrait stopper net la machine pour se réveiller. Mais ce n’est pas possible pour le moment...





Est-ce que les paroles de cette chanson font référence à quelqu'un de bien particulier ou peuvent-elles être une métaphore de la condition humaine ?

J’ai écrit cette chanson en pensant à mes 2 frères décédés, et qui ont eu moins de chance que moi. Des vies cabossées et des parcours qui se sont brutalement stoppés. Ce sont aussi des gens que j’ai pu côtoyer, qui ont manqué souvent d’amour, d’affection ou d’attention, et qui n’ont pas pu redresser la barre alors qu’ils allaient vers une impasse. On en connaît tous, je pense.


Il y a un joli break au piano, qui crée un instant de flottement sur lequel nous comprenons que le protagoniste s'est tué en voiture. Lorsque le rythme s'accélère à nouveau pour retrouver sa rage initiale, celle-ci est décuplée. Cette catharsis finale n'était-elle possible que par cette pause en forme d'élévation car nous ressentons encore plus de peine ou de rage après ce moment suspendu à un fil de vie (on ressent également cela sur 'Elle Attend').

Musicalement ce genre de montagnes russes émotionnelles, ça marche plutôt bien. Et plus largement, dans le domaine artistique, passer du calme à la tempête, ça crée un effet que j’adore. Le froid et le chaud. Alors oui, faire monter la tension après une grosse descente, ça donne encore plus de relief au propos. J’adore ça et le piano amène tellement de chaleur au propos, qu’il fallait lui accorder toute la place qu’il mérite.


Nous pouvons penser que cette vignette sonore s'apparente à un petit court-métrage, est-ce que le cinéma vous inspire et avez-vous des films de chevet aussi éclectiques que vos influences musicales ?

Absolument. Je me considère, sans trop de prétention, comme amateur de cinéma. Depuis toujours, j’adore le 7ème art et la magie qu’il opère sur les spectateurs. Quand je compose et j’écris, je vois directement le film qui se trame sur la musique. Chaque note est une image, chaque mot devient une phrase d’un dialogue imaginaire.


'Touche Touche' se fait plus inquiétante avec la basse funèbre et la touche électro qui nous invite dans un train-fantôme. Pourtant le refrain qui suit est plus positif et lumineux, était-ce voulu de devancer ainsi les attentes ?

Oui, j’avais envie de contrebalancer le côté ombrageux et mineur des couplets par des refrains lumineux et majeurs. C’est surtout une histoire d’amour, d’un duo, d’un couple qui se fait du bien par le mal. Il s’agit d’une relation toxique et addictive, où chacun prend à son tour le dessus sur l’autre.


Vous avez des goûts éclectiques sur lesquels nous vous avions interrogé la fois précédente, comment réussissez-vous à vous mettre d'accord sur les directions que vous souhaiteriez emprunter sur vos chansons ?

Houlala...disons que nous mettons tout sur la table et que nous tentons un compromis. Mais comme on est passé de 5 musiciens à 3, c’est un peu plus facile maintenant !


'Les Torrents D'Altitude' démarre sauf erreur sur le son d'un Wurlitzer auquel s'adjoint bientôt une énergie brute. Comment avez-vous réussi à intégrer ce son de piano reconnaissable entre mille à un propos assez sombre tout en réussissant à conserver à l'oreille l'opposition entre les deux différentes atmosphères ?

Nous tentons des choses, et nous nous fions à notre instinct, ce n'est pas aussi intellectuel que ça peut paraître. Et puis, pour nous le titre n'est pas si sombre que ça, on trouvait un côté  bluesy à la grille, donc un son vintage, comme le Wurlitzer, ça pouvait bien coller.


'NPNG' (No Pain No Gain) est-ce que cela pourrait être la phrase écrite par une société malade qui à l'instar de Jack Torrance recopierait des kilomètres de pages avec ces 4 lettres (comme « All work and no play makes Jack a dull boy » dans le "Shining" de Stanley Kubrick)?

Je ne suis pas allé aussi loin, mais la référence me plaît. En fait, j’étais plus sur la référence au film du même nom, tiré d’une histoire vraie, et qui raconte l’histoire de ces haltérophiles américains qui ont commis des meurtres ignobles pour s’accaparer les biens d’autres personnes. Des gens capables du pire, uniquement pour atteindre un niveau de vie plus confortable. Pour moi c’est aussi le crime que l’on commet sur la nature qui nous entoure. On en tire profit, sans états d’âme, juste pour en jouir. Deux personnages s’expriment dans la chanson, celui des couplets, climato-sceptique, abruti heureux, et celui des refrains qui fait le bilan, pessimiste.






L'écho delay sur la voix, est-ce une façon de rendre le propos faussement cynique, plus urgent, en le dédoublant?

Plus urgent, je ne sais pas, plus ridicule, avec le delay et le pitch, oui.


'Les Horaires De Bureau' change d'atmosphère. La puissance du désir n'est égale que la violence de la frustration du protagoniste qui nous livre ses pensées les plus noirâtres avec des violons. Tout amour s'accompagne de désirs malsains, fruits du désespoir, mais n'avez-vous pas peur que votre texte soit mal interprété ?

De mon point de vue, le désir n’est pas malsain, mais le désir revêt de nombreuses facettes, y compris celles que certains peuvent désigner comme déviantes. Si certains l’interprètent mal, c’est certainement qu’ils ne l’auront pas compris. Je suis prêt à expliciter, si on me le demande et qu’on me laisse la parole. Dés qu’on utilise un vocabulaire un peu cru, sexué, dans une chanson, on a des gens qui bloquent. C’est de l’ordre de l’a priori, mais si on écoute vraiment mon texte, on comprend bien qu’il s’agit d’un histoire de désir infructueux. Alors que de mon point de vue c’est tout autant le fantasme d’un homme qui désire une femme et qui ne pourra pas s’incarner dans la réalité, que d’un point de vue social, deux classes sociales que tout oppose, le sdf et la working girl, deux mondes qui se croisent mais ne peuvent entrer en contact que par la collision.


Le titre 'L'Happeur' est un joli mot-valise (happer et peur). Est-ce que l'humour est pour vous la politesse du désespoir ?

Oui, c’est juste. On pratique l’humour, la distanciation, la dérision et le second degré, autant que possible, et même souvent un peu trop pour le commun des mortels ! J’aime bien aussi la citation de Beaumarchais : «  Hâtons-nous d’en rire avant d’en avoir à en pleurer ».


J’aime bien aussi la citation de Beaumarchais : «  hâtons nous d’en rire avant d’en avoir à en pleurer ».


Est-ce que 'Cours Lentement' s'inscrit à la suite du poème de Kipling figurant sur votre premier album ?

Oui, c’est aussi un texte à destination des mes enfants, du plus petit et plus largement des générations futures. Je l’ai écrit durant le confinement, il y a autant de mélancolie que d’espoir. L’idée générale serait de ralentir le temps, dans notre époque où tout va trop vite, respecter la nature et se connecter à elle.


Avec ses thèmes sociaux et contemporains, ses jeux entre la vie et la mort, sa valse du temps ('Sixteen'), peut-on parler de cet album comme un concept-album ?

Nous ne l’avons pas composé comme ça, mais au final c’est peut-être l’idée inconsciente.


L'album se ferme sur 'Toujours Résolu', assez power-rock et porté vers la lumière. En somme, l'écoute de cet album est-elle une quête initiatique qui nous guide vers la lumière dissimulée derrière les nuages d'un marasme quotidien très contemporain ?

Oui, on a hésité à terminer sur ‘Cours Lentement’, mais je trouvais ça trop convenu, et ‘Toujours résolu’ à la base c’était le premier titre de l’album. Finir sur un titre plus énergique et lumineux, j’espère que ça sera une ouverture vers un futur troisième album !


Le précédent album faisait moins de 40 minutes. Celui-ci les dépasse allégrement. N'avez-vous pas peur d’être trop généreux en offrant à l'auditeur un album copieux et assez sombre ?

Au contraire ! Nous n’avons pas respecté les codes de durée des titres de moins de 3 minutes, et si la durée de l’album est généreuse, tant mieux. On a plutôt eu des retours de frustration après "Jusqu’ici..." alors nous voulions vraiment proposer un LP qui soit plus fouillé, plus abouti encore. Je crois que c’est le cas, et tant pis si ça va pas dans le sens du secteur avec des EPs de 4 titres. On prend le risque, nevermind !


Certaines chansons seraient une bouffée d'air bienvenue sur des radios comme Pop Rock Station de RTL2. Suite à notre précédente conversation dans laquelle vous nous disiez ''Si les grands médias jouaient le jeu de la « vraie » découverte, et pas des artistes façonnés par leurs DA, on pourrait imaginer autant d’audimat et de streams sur nous que sur des artistes plus « grand public ». Je dis toujours qu’on n’est peut-être pas « grand public » mais « large public''». Avez-vous le même regard aujourd'hui sur les radios ? Peut-on envisager à terme une fatigue de la part des auditeurs qui n'ont plus envie d'entendre 3 fois le même morceau toutes les heures ?

Non, hélas rien n’a changé. On est toujours dans la même situation. On a la chance d’avoir l’aide de Yann et Eloa comme attachés de presse, et ça fait déjà pas mal avancer notre histoire, mais les médias plus conséquents comme l’émission de Zégut, c’est quasi impossible de rentrer en contact pour un groupe comme nous. En ce qui concerne les radios généralistes, comme on façonne les goûts des auditeurs à des sonorités qui ne sont pas les nôtres, forcément on détonne, et pour beaucoup d’auditeurs, ce qu’on propose va les contrarier, les irriter. Trop de guitares, ou de voix criardes. Reste ceux que ça va intriguer. On espère leur donner envie de nous découvrir. Mais on ne se leurre pas, ils sont peu nombreux, on est sur une niche. Le rock français a mauvaise presse. Tout le secteur a un à priori, c’est une ségrégation. Aujourd’hui un groupe français doit chanter en anglais pour être « respectable ». C’est aberrant. Il suffirait qu’un gros programmateur nous mette sur sa playlist pour que tout change. On est parfois dépités. Mais à chaque fois qu’on pense à raccrocher, y a des belles personnes, qui viennent, à la fin des concerts, ou sur le net, et nous témoignent de leur soutien. Alors, on tient grâce à eux, et pour eux. C’est difficile de rester toujours résolus, et jamais résignés. Mais on s’y essaie.





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